PARIS-BANLIEUES
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Entre ces deux photographies,où nous regardent dans l'une les ouvriers d'une fonderie de Paris vers 1910 tandis que l'autre offre la vue en surplomb d'un modeste pavillon à Argenteuil, vers 1939, il n'existe aucun lien, sinon celui, jadis extrêmement fort, entre labeur en ville et habitat suburbain. Ce serait bien le diable si un de ces ouvriers n'avait pas en tête la vision d'un repos en famille, entre cour et jardin, la journée faite. S'il franchit jamais le pas, ce fut après bien des hésitations et, s'il réussit un ancrage en terre banlieusarde, ce ne put être qu'au terme de grandes difficultés.
C'est autour de ces sortes de liens que j'ai constamment tourné dans mes recherches sur le passé des banlieues de Paris. L'occasion en fut l'impulsion donnée par Guy Burgel et Philippe Vigier aux travaux sur la banlieue, à Nanterre. L'équipe constituée autour d'eux reçut aussi le précieux renfort de Jean-Claude Farcy.
Qu'ai-je découvert en fouillant de la sorte cette histoire ? En premier lieu, une grande discordance des temps et des espaces. Les territoires englobés par le terme banlieue n'ont jamais marché du même pas, ils ne sortent pas du même moule. Ici malheur et exclusion, et là oisiveté et robe blanche, et tout cela au même âge. Aubervilliers qui pue et Montfermeil qui rit sont des contemporains. Mais plus forte que cette diversité - elle-même produit complexe des tensions et des aspirations, et non bien sûr fruit du hasard, faut-il le préciser ? -, fut toujours la tyrannie des images plaquées sur cette terre, haut lieu des représentations, vraie capitale des stéréotypes. Tour à tour vert paradis, puis cauchemar rouge, aujourd'hui brasier dans la nuit, la banlieue donne un visage et un nom, hier au désir d'avoir un coin à soi et, de nos jours, à la peur, voire à la haine du pauvre. Mais la "banlieue" n'appartient à personne, pas même au pauvre, parce que ce grand corps eut toujours une âme multiple.
Ainsi, pour comprendre quelque chose aux rapports de tous ordres entre espace parisien et espace banlieusard, tels que la géographie et l'histoire ont fixé - figé, plutôt - ces espaces, il faut complètement et résolument s'abstraire du discours politique de la récrimination et de la dénonciation, maintes fois réédité dans le passé récent. Le discours politique doit être constamment remis à sa place : jamais il ne décrit ces rapports pour ce qu'ils sont, mais il passe son temps à plaider pour les fins de sa cause.
C'est autour de ces sortes de liens que j'ai constamment tourné dans mes recherches sur le passé des banlieues de Paris. L'occasion en fut l'impulsion donnée par Guy Burgel et Philippe Vigier aux travaux sur la banlieue, à Nanterre. L'équipe constituée autour d'eux reçut aussi le précieux renfort de Jean-Claude Farcy.
Qu'ai-je découvert en fouillant de la sorte cette histoire ? En premier lieu, une grande discordance des temps et des espaces. Les territoires englobés par le terme banlieue n'ont jamais marché du même pas, ils ne sortent pas du même moule. Ici malheur et exclusion, et là oisiveté et robe blanche, et tout cela au même âge. Aubervilliers qui pue et Montfermeil qui rit sont des contemporains. Mais plus forte que cette diversité - elle-même produit complexe des tensions et des aspirations, et non bien sûr fruit du hasard, faut-il le préciser ? -, fut toujours la tyrannie des images plaquées sur cette terre, haut lieu des représentations, vraie capitale des stéréotypes. Tour à tour vert paradis, puis cauchemar rouge, aujourd'hui brasier dans la nuit, la banlieue donne un visage et un nom, hier au désir d'avoir un coin à soi et, de nos jours, à la peur, voire à la haine du pauvre. Mais la "banlieue" n'appartient à personne, pas même au pauvre, parce que ce grand corps eut toujours une âme multiple.
Ainsi, pour comprendre quelque chose aux rapports de tous ordres entre espace parisien et espace banlieusard, tels que la géographie et l'histoire ont fixé - figé, plutôt - ces espaces, il faut complètement et résolument s'abstraire du discours politique de la récrimination et de la dénonciation, maintes fois réédité dans le passé récent. Le discours politique doit être constamment remis à sa place : jamais il ne décrit ces rapports pour ce qu'ils sont, mais il passe son temps à plaider pour les fins de sa cause.
1. "De l'urbain à l'urbain. Du courant parisien de peuplement en banlieue (1880-1914)"
Cet article reprend la question du courant de peuplement d'origine parisienne qui, entre les années considérées, contribua à la formation démographique de la banlieue. Ces mouvements internes à l'agglomération semblent avoir pour cause un début d'exclusion du Paris intra muros des catégories populaires : nombre de familles ouvrières avec enfants viennent chercher en banlieue des logements moins chers et plus grands. Mais ce courant est surtout constitué par la petite bourgeoisie parisienne, qui s'installe en banlieue à la recherche d'une sorte de campagne urbaine dispensant respectabilité et santé. Cette utopie collective touche même certains milieux ouvriers. La banlieue à cette époque est à la fois un pis-aller et un lieu d'un désir.
"From Paris to the Suburbs : Immigration Trends (1880-1914)"
This article looks again at the streams of people of Parisian origin who contributed to the demographic formation of the suburbs for the period 1880-1914. The movements within the agglomeration seem to have been caused by the exclusion from Paris intra muros of popular categories : many working-class families with children look in the suburbs for cheaper and bigger flats. But the shift was composed mostly of the Parisian people bourgeoisie settling in the suburbs in order to find a kind of urban countryside, sign of respectability and fresh air. This utopia even touched middle-class workers.The suburbs of this period are at once a last resort and a desirable place.
This article looks again at the streams of people of Parisian origin who contributed to the demographic formation of the suburbs for the period 1880-1914. The movements within the agglomeration seem to have been caused by the exclusion from Paris intra muros of popular categories : many working-class families with children look in the suburbs for cheaper and bigger flats. But the shift was composed mostly of the Parisian people bourgeoisie settling in the suburbs in order to find a kind of urban countryside, sign of respectability and fresh air. This utopia even touched middle-class workers.The suburbs of this period are at once a last resort and a desirable place.
Article publié dans Villes en parallèle [Université de Université Paris Nanterre], n° 15-16 : "Peuplements en banlieue", 1990, p. 152-170.
2. Les premiers banlieusards. Aux origines des banlieues de Paris 1860-1940
Ouvrage collectif paru à Paris aux éditions Créaphis en 1991, 285 p.
Extrait de la 4e page de couverture : Fruit d'un travail collectif réalisé à la suite d'une rencontre à l'abbaye de Royaumont, et patronné par l'Université Paris Nanterre, cet ouvrage s'attache à montrer certains aspects de l'histoire récente de nos banlieues : la nature et l'origine des populations progressivement agglomérées, les raisons de ce peuplement, les modalités d'installation dans ces nouvelles demeures du peuple. Qui étaient les premiers "banlieusards", et que peut-on dire de ce que fut leur vie ?
Mais la question principalement posée, à travers cette série d'études sur les pratiques sociales en banlieues populaires (jardins ouvriers, sociabilité en quartiers pauvres, "choix pavillonnaire") est celle du rejet ou de l'intégration : la banlieue naît-elle comme un espace de rebut ou bien fut-elle, au contraire, le produit d'une conquête, un lieu d'aspirations, voire d'utopies ?
Les réponses évoquées ne sont pas indifférentes pour une meilleure compréhension des réalités complexes d'aujourd'hui, au delà des mythes et des raccourcis médiatiques [...]
Mais la question principalement posée, à travers cette série d'études sur les pratiques sociales en banlieues populaires (jardins ouvriers, sociabilité en quartiers pauvres, "choix pavillonnaire") est celle du rejet ou de l'intégration : la banlieue naît-elle comme un espace de rebut ou bien fut-elle, au contraire, le produit d'une conquête, un lieu d'aspirations, voire d'utopies ?
Les réponses évoquées ne sont pas indifférentes pour une meilleure compréhension des réalités complexes d'aujourd'hui, au delà des mythes et des raccourcis médiatiques [...]
Table des matières
Introduction Banlieue noire, banlieue verte. Lecture historique d'un espace urbain, Alain Faure
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Les banlieues de Paris au seuil du 20e siècle
Banlieues 1891, ou les enseignements d'un recensement exemplaire, Jean-Claude Farcy
La banlieue, un rejet ?
Paris, le peuple, la banlieue, Alain Faure
Version originale électronique (fichier PDF en mode image : 16,5 Mo)
Les "Passages" à Levallois, ruelles pauvres en banlieue, Patrick Gervaise
La banlieue, une conquête ?
Banlieue, mon amour... , Alain Faure
Version originale électronique (ficher PDF en mode image : 6,1 Mo)
Le choix du pavillonnaire, Françoise Dubost
Naissance d'un quartier ordinaire en banlieue parisienne : le Nouveau Domont (1923-1938), Annie Fourcaut
Jardins ouvriers et banlieue : le bonheur au jardin ? Béatrice Cabedoce
3. "A l'aube des transports de masse : l'exemple des "trains ouvriers" de la banlieue de Paris (1883-1914)"
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Article paru dans la Revue d'histoire moderne et contemporaine, avril-juin 1993, p. 228-255
Reproduction à télécharger d'une carte d'abonnement ouvrier de 1914
4. "Villégiature populaire et peuplement des banlieues à la fin du 19e siècle. L'exemple de Montfermeil"
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Article paru dans l'ouvrage La terre et la cité. Mélanges offerts à Philippe Vigier. Paris, Créaphis, 1994, p. 167-187 (réédité dans Le Vieux Montfermeil et sa région, n° 181, 1er semestre 2010, p. 5-36)
5. "Transfuges et colons : le rôle des Parisiens dans le peuplement des banlieues (1880-1914)"
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Article paru dans Jean-Paul Brunet dir., Immigration, vie politique et populisme en banlieue parisienne (fin 19e-20e siècles). Paris, Éditions L'Harmattan, 1995, p. 29-48.
6. " 'Les couches nouvelles de la propriété'. Un peuple parisien à la conquête d'un bon logis à la veille de la Grande Guerre"
Cet article repose sur le dépouillement de 380 dossiers de prêts hypothécaires consentis entre 1912 et 1914 par une société de crédit à des ouvriers et à des employés désireux de se faire construire un pavillon dans la banlieue de Paris. Sont examinés successivement la situation familiale, les métiers, les revenus et le lieu de travail de ces "accédants". La conclusion est qu'ils appartiennent aux catégories supérieures du salariat, mais qu'ils restent du peuple. Or, la baisse du loyer avec l'élévation du revenu quand ils étaient encore locataires - baisse considérée depuis Maurice Halbwachs comme la preuve de l'indifférence ouvrière en matière de logement - se vérifie aussi chez eux. C'est le principal argument de l'auteur pour remettre en cause cette indifférence: être bien logé est une aspiration ouvrière.
" 'New social strata amongst property owners'. Working-class aspiration to be decently housed in Paris before 1914
This article is based on the analysis of 380 dossiers prepared by a loan society between 1912 and 1914 for the granting of mortgages to workers and employees planning to build new homes in the Paris suburbs. The dossiers go into the candidates' family situations, their trades, their incomes and their place of work. The analysis concludes that these candidates come from the upper categories of wage-earners, whilst still belonging to the people. Rising incomes and falling rents are also 1to be noted, when these candidates are still in rented accommodation. Since Maurice Halbwachs, this fall in rent levels has been seen as an argument proving working-class indifference to housing conditions. The sources examined here enable the author to bring this indifference into question : to be decenl1y housed was a real working-class aspiration.
Article paru dans Le Mouvement social, janvier- mars 1998, p. 53-78.
. Document annexe : Reproduction de deux publicités parues dans L'Humanité en 1913, l'une pour un lotissement ordinaire à Pierrefitte et l'autre pour la cité coopérative "Paris-jardins".
- Voir aussi le compte rendu du livre d'Annie Fourcaut, La banlieue en morceaux. La crise des lotissements défectueux en France dans l'entre-deux-guerres, 2000, 339 p. (paru en décembre 2003 sur le site H-Urban et dans la Revue d'histoire moderne et contemporaine, janvier-mars 2004, p. 234-239).
- Voir aussi le compte rendu du livre d'Annie Fourcaut, La banlieue en morceaux. La crise des lotissements défectueux en France dans l'entre-deux-guerres, 2000, 339 p. (paru en décembre 2003 sur le site H-Urban et dans la Revue d'histoire moderne et contemporaine, janvier-mars 2004, p. 234-239).
7. Sentiments et usages de la propriété chez les ouvriers de Paris au 19e siècle
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Texte inédit d'une communication présentée au colloque de Cerisy sur "La propriété" (Centre culturel international de Cerisy-La-Salle, du 9 au19 juillet 1999).
8. "Un faubourg, des banlieues, ou la déclinaison du rejet"
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Article paru in Jean-Charles Depaule dir., Les mots de la stigmatisation urbaine, Editions Unesco / Maison des sciences de l'homme, 2006, p. 8-39.
- Voir aussi le compte rendu du livre de John M. Merriman. Aux marges de la ville. Faubourgs et banlieues en France 1815-1870, 1994 (paru dans la Revue d'histoire moderne et contemporaine, avril-juin 1995, p. 333-335).
- Conférence du 19 septembre 2010 : "Vivre en banlieue, choix ou contrainte ?" On pouvait l'écouter sur le site Mémoires et histoire au-delà du périph' jusqu'en 2014, date à laquelle elle est tombée dans la poubelle du web… On ne se baigne jamais deux fois dans le même Internet.
Descente des ouvriers de la Croix-Rousse en novembre 1831 à Lyon
(gravure non datée : 1880 ?)
Alain Faure. Pages personnelles
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afaure@parisnanterre.fr
NAVIGATION :
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Orientation
Histoire de la petite entreprise
Le peuple de Paris : actes et images
Histoire sociale de l'espace urbain :
Du spatial au social : grands travaux, quartier, mobilités intérieures
Paris-banlieues
Migrations
et hébergement des migrants
La ville et l'industrie
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Mis à jour le 15 mai 2017